La relation entre tradition et modernité a été un thème central de la philosophie postcoloniale africaine. Pendant que les philosophes africains examinaient ce thème sous plusieurs angles, plusieurs questions essentielles sont devenus les points importants du débat et de la discussion. Quelle est la pertinence des traditions africaines face aux défis de la vie contemporaine? Est-ce que les modes de pensées et de comportement constituent des ressources et provisions utiles aux projets de développement et de modernisation en Afrique? Qu’est-ce qu’on entend précisément par les termes « développement » et « modernisation » quand ils sont utilisés à l’endroit des pays africains?
Tout d’abord, malgré la différence de contexte avec l’Afrique, il est évident qu’Haïti, pour hâter la guérison de ses maux du passé, a intérêt à s’inspirer de certaines démarches de la « Renaissance africaine », qui auraient un impact positif immédiat sur le pays.
La promotion des langues africaines dans le cadre de la « Renaissance africaine » devrait inciter à une réelle promotion du créole haïtien, couplée à la maîtrise de plusieurs langues internationales comme cela se fait en Afrique par exemple avec le français, l’anglais, le portugais et l’espagnol.
Néanmoins, la réussite de la « Renaissance africaine », qui permettra à l’Afrique de devenir un acteur d’envergure planétaire, aura un impact fondamental sur Haïti : elle décomplexera l’âme africaine des Haïtiens, qui seront fiers d’un continent mère développé, et elle leur fera oublier la gêne passée qu’il y avait à provenir d’une Afrique pauvre, soi-disant arriérée et sauvage…
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Les préoccupations écologiques apparaissaient récemment comme un phénomène de mode, voire l’expression d’une conscience retardataire sur les progrès de l’humanité. Maîtriser la nature au service de la croissance économique était considéré comme la condition de l’essor des sociétés humaines et permettait le progrès scientifiques et technologiques. Mais avec la prise de conscience universelle de la nécessité de protéger l’environnement cette euphorie va connaître un déclin. En effet, l’altération des grands équilibres de la planète, l’érosion de la diversité génétique, la raréfaction ou la disparition d’espèces vivantes, l’exploitation sans pause du minéral et autres, acculent l’homme à une prise de conscience réactive en vue d’une nouvelle problématisation de son rapport à la nature, en somme d’une approche fondamentale ouverte sur une perspective de mise en relation écosystémique entre le sujet et l’objet.
En Afrique, les représentations locales de l’environnement intègrent outre les problèmes juridiques, des problèmes humains et sociaux qui rendent les distinctions occidentales entre nature et culture inappropriées pour comprendre les conceptions africaines des relations entre les hommes et l’environnement. La présente réflexion s’inscrit d’une part, dans le constat d’échec que nous venons de souligner très brièvement, mais relève aussi et surtout d’une problématique d’une nouvelle approche pour un développement durable expliquant d’abord les fondements scientifiques du droit de l’environnement et ensuite les représentations culturelles Africaines de la gestion de l’environnement.
La greffe tradition-modernité n’a produit que de l’hybride et ne satisfait même pas ceux qui sont, matériellement, comblés. Ce que l’on gagne vaut-il ce que l’on perd ? Il y a permanence d’un déséquilibre social causé par la superposition de deux civilisations différentes qui malgré les multiples points de rencontre ne se sont pas intégrées harmonieusement. Apparemment aucune symbiose ne se profile à l’horizon. Tandis que, sur le même terrain, L’une progresse l’autre recule, malgré une forte résistance. Nous verrons comment la tradition survit dans les cités modernes. C’est la « ruse des valeurs » qui cherchent à s’exprimer dans diverses formes d’organisations sociales ou religieuses (mbootaay ou dahira ). Besoins de retrouvailles ou simple nostalgie de la vie communautaire dont les bases ont été démolies ? Notre monde va-t-il changer de base ? Si, comme nous l’affirmons au Sénégal la culture est au début et à la fin du développement, il nous faut créer des structures adaptées à notre conception de la vie, de la société et du développement communautaire. Existe-t-il une stratégie de rupture pouvant conduire à un développement endogène et communautaire ?
L’article propose d’analyser les modes de réappropriation du droit par les populations au Sénégal, en se focalisant sur l’accès à la terre en milieu urbain, dans la ville de Saint-Louis. La réappropriation des codes du droit de l’urbanisme et de la façon d’aménager l’espace en ville va de pair avec la réception du modèle juridique français. Le processus de légitimation du modèle étatique a débuté pendant la période coloniale durant laquelle les principes d’appropriation individuelle et exclusive de la terre ont également été mise en oeuvre par les autorités coloniales. Bien que les conceptions traditionnelles continent d’avoir une grande importance dans l’accès à la terre, en ville, les populations utilisent également le droit étatique en vue de la reconnaissance de leur droit d’occuper. Ainsi, le modèle juridique de l’État sénégalais est-il en concurrence avec les modes traditionnels d’accès à la terre.
Les alliances à plaisanteries sont un phénomène social, caractéristique des relations humaines. De même qu’il existe dans certaines sociétés, certaines civilisations des échanges et des hiérarchies entre les membres de familles, de même il existe des liens entre les membres de clans différents. Ces types de relations ont longtemps été expérimentés dans beaucoup de sociétés africaines pour diverses raisons. La plupart traduisent des relations religieuses, militaires, économiques, juridiques à l’intérieur de la famille, du clan ou entre groupes alliés.
Notre propos concerne donc un retour à une pratique usuelle, en vigueur dans les sociétés africaines anciennes où des conflits ont existé entre les hommes, celle des alliances à plaisanteries.
1-Quelle est l’étendue historique de cette forme de règlements des conflits sur notre continent en général et en Afrique de l’Ouest en particulier ?
2-La constitution des alliances à plaisanteries et sur leur évolution dans le temps.
le document issu de la concertation des communicateurs traditionnels ouest-africains à Kankan en République de Guinée en 1998 présente les 44 articles de la charte du Mandé plus connue sous le nom de la Charte du Kurukan Fuga et crée en 1236 après la bataille de Kirina (Mali)
C’est une sorte de déclaration des droits et devoirs des citoyens dans un nouveau ordre politique.
Cet article résume l’intérêt qu’il y a faire émerger un Etat de droit qui tient compte de la nécessité de créer des consensus entre « le formel » et « l’informel », les cultures africaines métisses. Bref c’est à une invention du droit que nous invite cet article.
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Le pluralisme juridique est une des composantes de la réalité juridique au Cameroun. Il comporte deux aspects : l’un institutionnel, l’autre matériel. Le premier signifie qu’à côté des juridictions de droit moderne, subsistent les juridictions de droit traditionnel1, tandis que le second recouvre le pluralisme des règles de fond, lesquelles comportent d’une part les coutumes qui forment ce qu’on appelle le droit traditionnel, et d’autre part un droit d’origine occidentale qui est généralement appelé droit moderne ou encore droit écrit.
Les juridictions de droit traditionnel ont en principe vocation à appliquer la coutume pour le règlement des litiges qui leur sont soumis. Mais compte tenu de la diversité des coutumes et du fait qu’il n’existe pas au Cameroun un recueil de coutumes, il a été institué des assesseurs dont la mission est d’aider le président de la juridiction à former sa décision suivant les coutumes qu’ils représentent. La difficulté d’une participation effective des assesseurs à l’administration de la justice, ou tout au moins de la parfaite représentation des coutumes résulte donc de deux faits majeurs : auprès des juridictions traditionnelles, il y a régulièrement absence de représentants coutumiers convenables et lorsque les assesseurs sont régulièrement désignés à siéger, ils se caractérisent par une inefficacité notoire.
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L’auteur qui est un traditionnaliste propose sa vision de la citoyenneté et de l’efficacité publique locale en s’adossant sur les traditions africaines. Il s’appuie sur le texte fondateur de l’empire du Mandé au 13 ème siècle pour proposer un renouvellement de la citoyenneté à l’aune des défis du présent.
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L’ASSOCIATION N’KO est une organisation africaine très portée sur les questions de gouvernance en Afrique en prenant racine sur les valeurs anciennes qui déterminent encore certains comportements des acteurs. Elle est engagée à entreprendre des recherches dans ce sens et à réaliser des études visant à rendre visible les pratiques anciennes de gouvernance et à les mettre en corrélation avec les approches développées actuellement en la matière. Ainsi, une documentation assez fournie a été réalisée dont le présent document constitue une compilation d’extraits. Ce document donne des éclairages sur les évolutions des pratiques de gouvernance et les déterminants de chaque étape de cette évolution. Aussi, il existe une grande convergence d’objectifs entre l’Association N’KO et le Réseau Gouvernance par rapport à l’initiative d’élaborer une charte africaine de la gouvernance légitime.
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L’auteur invite le Mali à étudier l’expérience du Ghana qui a intégré les dirigeants traditionnels par la création de chambres des chefs qui fonctionnent depuis le niveau national jusqu’à l’échelon régional et communal. Ces structures cohabitent avec d’autres instances issues d’élection. Cette voie est un moyen de concilier les différentes légitimités car les élections multipartistes ne sont qu’une des expressions de la légitimité politique.
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C’est au cours de cette assemblée que les sages et les érudits ont élaboré en 1236 les lois fondamentales du Manding sous le règne de Soundiata KEITA (empereur du Mali). Le Mali historique couvrent les territoires du Mali actuel, du Sénégal, des 2 Guinées etc. Les sources d’inspiration des législateurs étaient triples. Ce sont :
a)- Les lois coutumières du vieux Manding ont été passées au peigne fin par les juristes. Les plus progressistes d’entre elles ont été adoptées, le reste tombé dans l’oubli.
b)- Les lois coutumières Sarakolés fortement influencées par l’Islam ; Soundiata KEITA a reconnu la supériorité de certaines coutumes Sarakolées par rapport aux coutumes Mandingues. Il les a donc adoptées et consignées dans les textes de lois promulguées lors de l’Assemblée de Kouroukanfoua.
c)- Enfin, Soundiata a conservé certaines lois héritées de la domination du Manding par Soumaoro KANTE (son adversaire) entre 1205 à 1235. Ces lois étaient particulièrement sévères mais justes.
Commentaire
Il existe plusieurs versions de ce texte, celle-ci en est une.
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Le Togo comme les autres pays africains a connu le transfère des institutions notamment du droit de souche occidentale avec le processus d’acculturation juridique qui s’en est suivi.
Avec l’introduction de l’ordre juridique français, le Togo voit arriver de nouvelles normes de valeurs. La famille nucléaire, l’écrit, le cartésianisme dans la recherche de la vérité, une justice froide qui tranche et renvoie dos à dos les parties sans s’occuper de l’après procès etc.
Mais le colonisateur a été contraint d’accepter un dualisme transitoire qui devait conduire les togolais vers le droit dit moderne. Le pluralisme juridique et la diversité des statuts juridiques étaient nés avec des réinterprétations diverses.
C’est dans ce contexte dualiste que le pays a acquis son indépendance.
Le législateur entreprit de produire une symbiose entre le droit français et le droit coutumier. Un effort remarquable a été fait notamment dans le droit de la famille mais le pluralisme existe.
La greffe du droit français sur le droit tém aboutit à une coexistence entre le droit coutumier (droit ancien), le droit musulman presqu’assimilé au droit coutumier et le droit dit moderne.
Aujourd’hui encore, 40 ans après, les populations étudiées (les tém) n’ont pas acquis le réflexe mécanique de s’adresser, de façon automatique, au tribunal en cas de litige. Les coutumes sont encore vivaces et l’espace juridictionnel traditionnel continue de régler les litiges entre citoyens.
Pour tenter de comprendre l’écart entre le justiciable togolais et la justice, l’inadéquation entre le droit positif togolais et les réalités socioculturelles, l’auteur a entrepris une analyse des différents niveaux d’inadéquation entre le droit dit moderne et le droit tém à travers une analyse des raisons du pluralisme juridique, l’examen des interférences ou représentations symboliques des systèmes de droit en jeu et l’identification des mécanismes juridiques d’assimilation.
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Le colloque de Bamako, organisé par l’Institut de recherche et débat sur la gouvernance (IRG), l’Alliance pour refonder la gouvernance en Afrique et le Centre d’Expertises politiques et institutionnelles en Afrique (CEPIA), a été réalisé les 23, 24 et 25 janvier 2007 à Bamako (Mali).
Il s’agissait de voir de voir en quoi les valeurs traditionnelles de l’Afrique, son histoire, ses expériences politiques passées, peuvent servir de base à une réflexion sur la refondation de la gouvernance. Trois grandes questions ont été défrichées par les différents intervenants :
Le choix des dirigeants
La gestion du bien public
La redevabilité du pouvoir
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Une affaire tranchée par la Cour constitutionnelle béninoise le 19 Février 20021 offre l’occasion de s’interroger sur la conformité de la justice pénale traditionnelle aux droits de l’homme tels qu’ils sont prévus par la Constitution et les conventions et autres normes ou déclarations internationales. Les faits de l’espèce sont les suivants :
Le 08 Décembre 1998, Monsieur Boris Gbagudi saisit la Cour constitutionnelle pour porter plainte contre le pouvoir royal de Dassa Zoumè pour « sévices corporels et violation de la personne humaine ».2 Le requérant expose ceci : « Pour un crime ou un délit commis, c’est le roi et sa cour qui décident du sort du coupable. En exemple, à Dassa - Zoumè, lorsqu’un citoyen vole quelque chose, le fameux roi, Egbakotan II, donne des instructions à ses associés afin qu’on lui mette la main dessus. Ensuite, il est conduit au palais royal et là, il subit de véritables et humiliants sévices corporels qui lui sont honteusement administrés, et ce pour la plupart du temps par des bandits, les délinquants, les va-nu-pieds de Dassa - Zoumè ». Le requérant poursuit : « la même situation se produit également lorsqu’un citoyen est coupable de viol, d’inceste ou nie la paternité d’une grossesse qui, apparemment, lui appartient. Pendant ce temps, poursuit encore le requérant, il existe bel et bien une Brigade de Gendarmerie à Dassa - Zoumè (de même que) le Tribunal de Première Instance d’Abomey. Malgré tout cela, c’est le « roi qui décide arbitrairement du traitement infamant à infliger aux mis en cause ».
Saisie de cette requête et respectant la règle du contradictoire, la Cour constitutionnelle a diligenté des mesures d’instruction en direction du « roi des Dassa ». Ce dernier a répondu qu’effectivement, tout individu auteur sur le sol de Dassa -Zoumè de l’un des actes interdits par la tradition et les coutumes Idaasha et « dévoilé ou identifié par tous les moyens appropriés, est conduit au palais royal ». Il est aussitôt attaché par les cordes avant de subir un châtiment corporel consistant à le faire frapper de coups de chicottes car, ajoute le roi, « la commission demeurée impunie desdits actes entraîne toujours des conséquences malheureuses et regrettables » telles que « maladie incurable, mort, folie, disparition définitive ». Sur cette base, le Roi conclut que « Evolué fictif, l’auteur du recours. [Monsieur Boris Gbaguidi] peut être porté à prendre pour violation des droits de l’homme les sévices corporels dont il s’agit » or tous ces agissements se fondent, selon le roi, sur le pouvoir religieux qu’il tient de la tradition oro chiche. Face à ces faits signalés par le requérant et confirmés par le « roi » de Dassa, la Cour constitutionnelle s’est prononcée sur plusieurs points qu’il convient d’exposer en appréciant leur pertinence.
Dans un Etat de droit, la justice pénale est rendue au nom de l’Etat. La justice civile au sens large (rapports familiaux, problèmes fonciers ou domaniaux, rapports commerciaux et de travail) peut être « privatisée ». L’arbitrage commercial en témoigne de même que la justice civile proprement dite (affaires familiales et domaniales) .Cette privatisation (intervention de normes et/ou de personnes ne provenant pas de l’Etat) peut prendre aussi bien la forme des normes applicables que celles des juridictions compétentes. C’est autour de ces deux points qu’il importera de faire quelques réflexions à partir de la décision rendue par le juge constitutionnel béninois.
Comment refonder l’État africain en tirant les leçons de la constatation de l’aveuglement de la tentation uniformisatrice du modèle d’État-nation importé, de l’approche de l’État installé par la colonisation et imposée par les pouvoirs post coloniaux et les institutions financières internationales et des insuffisances consubstantielles à la conception des politiques de décentralisation dans les années 90 ?
Comment plus précisément institutionnaliser l’État en Afrique ? Répondre à ces questions est l’ambition de ce cahier de propositions.
L’Alliance pour Refonder la Gouvernance en Afrique y développe sa vision de l’identité de l’État-nation en Afrique, communauté de citoyens mais aussi communauté de peuples ; un État forcément traversé par une diversité sociale historiquement rebelle aux frontières des États post-coloniaux. Cette diversité commande que le pluralisme soit le principe qui ordonne la recherche de l’unité ; elle s’exprime et s’épanouit particulièrement à l’échelle locale.
Identité de l’État-nation, principe du pluralisme et territoires locaux sont associés dans une approche de gouvernance pour réaliser le programme de refondation de l’État en Afrique à travers trois grandes propositions :
admettre le pluralisme et le traduire dans une nouvelle ingénierie des institutions locales qui reflète la diversité des pouvoirs et de leur fondement ;
admettre le pluralisme et refléter la diversité des territoires locaux et des pouvoirs dans la refondation du constitutionnalisme ;
et, enfin, mettre le pluralisme au service de l’ordonnancement du droit et de la justice en créant des ponts entre l’ordre normatif étatique et les ordres normatifs extra-étatiques, notamment, et à titre illustratif, en admettant la médiation sociale comme système officiel de régulation des conflits.